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9 septembre 2005 5 09 /09 /septembre /2005 00:00
LE LARI ET LE FRANÇAIS :

 

PERCEPTION ET EXPRESSION DES CHOSES ET DES IDEES.

Conférence-débat animé le 30 mai 2003 au centre Culturel SONY – LABOU TANSI  à Bacongo –Brazzaville.

 

 

 

 

 

Par Romain Pierre MIENAHATA

 

 

Chercheur,

 

 

 

Directeur de l’IMA.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Brazzaville                                                                                                        Mai 2003

 

     

   

B.P. 1838, Tél. : (242) 5.36.77.73 Fax : (242) :

E-mail : mienahata_rp@yahoo.fr,  mienahata@hotmail.com.

 

Web site perso:http://lafriquepositive.site.voila.fr 

Brazzaville – République du Congo

 

______________________________________________________________________

Amené à présenter une  conférence-débat dans le cadre des activités culturelles du centre culturel SONY LABOU TANSI  pour la saison culturelle de l’année 2002, je choisi pour thème : « Le Lari et le français : perception et expression de choses et des idées », un extrait d’une vaste étude conduite depuis sept ans et dont les conclusions ont abouti à la mise en place de ma deuxième théorique linguistique : L’ACCOGNITIQUE : étude des accointances phoniques des mots des deux ou plusieurs langues désignant et même réalité.

 

 

Intitulé ainsi, ce thème énonçait un sujet   de thèse : ambitieux, dangereux mais exaltant :

-         ambitieux dans le domaine de la recherche où il est question de rechercher la vérité, la beauté et l’esthétique du monde spirituel qui gouverne l’acquisition du langage articulé par les humains ;

-         dangereux d’autant plus qu’on peut servir autre chose que la science . Et les interrogations sont nombreuses quant au pourquoi de comparer le Lari et le Français . Ne s’agit-il pas là  d’une étude osés !;

-         exaltante lorsque l’étude se propose de connaître deux peuples - l’un africain ,minoritaire et ancien sujet de second ; l’autre européen, majoritaire, ancien maître du premier et dans la part dans la construction de la civilisation de l’universel est considérable – face à l’appréhension du monde et son expression par la parole.

 

 

Cette étude qui à fait naître beaucoup de suspicion quand le thème fût énoncé publiquement, se situe tout bonnement à la suite de celles réalisées par le savant français, le professeur Claude Hagège sur l’ordre de mots dans les phrases et dont on en fait état à la page 72 de l’encyclopédie Universel à l’article grammaire, sous-section : typologie des langues ;et André Martinet dans les « éléments de linguistique générale » à la page 18. Mon intérêt  a été de tirer de l’ordre des mots dans les phrases et en fonction du verbe utilisé l’essence de l’expression de ses phrases :  la perception des choses et des idées.

 

 

Mon hypothèse de travail pour réaliser cette étude est inspirée par une phrase du professeur Bernard Cerguiglini, actuel délégué général à la langue française et que j’ai reformulé ainsi qu’il suit :  « toute langue a le pouvoir d’énoncer le monde ». Comment alors le français et le Lari le font-ils ?

 

 

Un double intérêt a été poursuivi en réalisant cette étude :

 

 

1) « atteindre derrière les réalités linguistique l’esprit dont sont sorties  les langues ) » ( Jules Vendryes )

2)- « éclairer la nature des capacités intellectuelles humaines ( Noam Chomsky ).

 

 

L’étude étant descriptive et analytique, descriptive par la manière de collecter l’information et analytique par l’exposition des résultats, la technique de recherche  utilisée est celle de la recherche documentaire .

La méthode utilisée est la méthode comparative substitut de l’expérimentation en sciences sociales, qui permet de dégager des rapports, des écarts et de rapprochement des objets correspondants mais replacés dans leur contexte global et abstrait : ici l’infusion de l’esprit de l’intelligence cosmique universel en les humains pour la formulation de la parole.

 

 

Comparer le Lari et le français, l’étude est-elle pertinente et le nombre de cas suffisants pour la fiabilité des résultats ?

 

 

Chaque science, nous dit André Martinet, présuppose le choix d’un point de vue particulier : seules pertinents en arithmétique sont les nombres, en géométrie les formes, en calorimétrie les températures. Il n’en va pas autrement en matière de description linguistique. Est pertinent ici : la perception des choses, des sensations, et leur manifestation par la parole. Par exemple :

1) « une grande  maison »  en français est traduite en Lari par : « nzo ya nene » :

Le premier locuteur voit une étendue qui est occupé par un objet, en considération de l’ordre des mots ; le second voit un objet « nzo »  qui occupe une étendue  (vaste ).

2) : « j’ai froid »  en français ) : L e froid est en moi

      « Kiozi nita mona »  en lari: le froid m’attaque

par la nature de la phrase prononcée, le froid n’est pas perçu de la même manière.

 

André martinet, ajoute : « toute description suppose une sélection tout  objet, quelque simple qu’il paraisse au premier abord, peut se révéler d’une complexité infinie. Or, une description  est nécessairement finie ». d’où le fait que la science tire actuellement des conclusions à partir d’un nombre limité de cas, quitte à découvrir plus tard un contre-exemple.

 

 

Avant de rendre compte  des résultats de mon étude je vais me plier à une exigence scientifique, dire quelque chose sur le Lari et Français :

 

 

- Les Lari forment avec les Koongo, Sundi et Fuumbu ( Jacquot, 1966 ) le sous-groupe oriental des Koongo nord-occident ( Soret,1959 ), population dont l’unité ethno- sociologique a été démontré par les travaux de Balandier ( 1955).

Ils occupent un territoire qui s’étend sur la rive droite du Congo au voisinage du Stanley- pool, de la rivière Foulakari au sud aux contreforts des plateaux Batékés au nord.

 

 

Le lari entant que langue, est un véhicule régional parlé dans le département du pool ( Congo –Brazzaville ) et dans Brazzaville- sud ( toujours Congo-Brazzaville ) où il s’est composé par le dynamisme des lari et la complicité de l’église Catholique Romaine qui en a fait langue de prière et d’évangélisation. Une des langues bantou de groupe Kikongo, parlée entre Brazzaville et l’océan, le lari est devenu comme une nouvelle langue brassant presque tous les autres dialectes  Kikongo, avec des tournures plus jeunes, des formes elliptiques et contractées qui la rendent plus souple, plus légère, plus expressive.

 

 

-Les français sont un peuple d’Europe qui habite la république française, un espace physique de 550.000 Km2 qui s’étend de la méditerranée, et des chaînes alpines qui entourent celle-ci, jusqu’au plaine du nord, à substratum hercynien.

 

 

Issue du latin : « vulgaire » ou populaire, le français s’est  constitué dans le domaine d’oil,  par suite des circonstances historiques et politiques ( unification du pays par le rois de France autour de Paris, leur capitale. Les caractéristiques dominantes de l’ancien français  sont ceux des variétés écrites et parlées en Ile- de France . Le premier texte en langue romane qui nous soit parvenu est celui des serments de Strasbourg ( 842).

 

 

Le français est une langue nationale, et par le dynamisme du peuple français , il est devenu langue internationale que par l’action coloniale, il est langue officielle pour de nombreux pays, tel le Congo une création de la France .Il est aussi langue de culture et de civilisation.  

 

A ce point de l’ exposé, voici les résultats de l’étude comparée entre « le Lari et le Français : perception et expression des choses et des idées » :

 

 

A/ Il y a convergence ente le lari et le français dans la perception et l’expression de la possession, de l’appartenance, de l’excès, du relatif et du superlatif.

Par exemple, dans la possession ou l’appartenance,  « l’on part de l’objet pour celui qui en est le possesseur» :

 

 

   {La mangue de maman                    { La poule de papa 

   {manga  ya  mama                           { nsusu ya  tata

   {Le chien l’a mordu                       { Les marmites se sont cassées    { Dieu est très bon

   {mbwa i tatikidi                             { binzu bi budikidi                        { nzambi wa mbote –mbote

 

 

B/ Il y a divergence entre le lari et le français dans la perception et l’expression de l’état du sujet ou de l’attribut du sujet, du démonstratif et du locatif :

-         Le français part du sujet pour l’état

-         Le lari part de l’état pour le sujet :

 

 

{ Je suis malade                         ( état dans lequel je suis )    ( usage du verbe être )

{ bubelo bwe nani                      (état que j’ai )                      ( usage du verbe avoir)

 

 

 { j’ai froid                                  ( état possédé )                    ( usage du verbe avoir )

 {Kiozi ni ta mona                      ( état senti )                         ( usage du verbe voir « sentir »)

 

 

{ je soufre                                   ( état vécu )                          ( un sous –entendu d’attaque )

{mpassi ni ta mona                     ( état vécu )                          ( usage du verbe  « voir » ( sentir) )

 

 

{muuntu wu

{ cet homme.

 

 

C/ Il y a tantôt  convergence, tantôt  divergence dans la qualification des idées générales :

 

 

{ kinzu kia kinga                                       { lundala lwa lugaa

                                 ( convergent )

{Une marmité neuve                                { une palme fraîche

 

 

{mwana wa nleeke         { ntima wa mbote            {meenga ma moonso

                                                                                                                       ( divergent )

{ un  jeune enfant          {  un bon cœur                  {tout le sang

 

 

D/ La perception et l’expression des choses est entre mêlée ( c-à-d divergente – convergente- identique ) dans la formation des numeronymes. Les linguistes ont constaté qu’en français les nombres sont des substantifs et en lari, ils son souvent des adjectifs. Cependant, de manière approfondie et en considérant la perception basse et populaire des nombres, il se dégage que :

-         le lari nomme les nombres de 1 à 10 puis procède par addition à partir de 11 jusqu’à 19. Il forme les multiples de 10 par multiplication ;

-         par contre , le français nomme les nombres de 1 à 16, puis additionne en prenant 10 pour référence de 17 à 19. Les multiples de 10 sont nommés de 20 à 60 ; 70 et 90 sont formés par addition, et 80 par multiplication.

 

 

A ce niveau le lari crée des substantifs ( par souci d’élégance ) : luzambwadi (70 ), lunana (80), luvwa (90).

-         A partir de 100 et au delà : le français et le lari forment les noms des nombres de la même manière :

-         nomination :    100, 1.000,1.000.000,  …..

-         multiplication : 200,  300,   4.000, ……….

-         addition : 103,    208,     1030,……………

 

 

 

 

 

E/ Le lari est légèrement supérieur au français dans la désignation des êtres :

 le français désigne les êtres sans les avoir  catégorisés :

 

 

{Le coq               { le chien

                    ,                            , on le sait ce sont des animaux ou des oiseaux

{la poule             {la chienne

 

 

Mais avant de marquer la différence qui  sont –ils d’abord ?

Pour  le lari, comme pour tout bantu : Ce sont de :

 

 

 

 

                              femelle  ( la poule )                                     femelle ( la chienne )

nsusu                                                       ; mbwa

                                mâle ( le coq )                                                   mâle ( le chien )

 

 

 

 

F/ Identiques en tant que langues dans lesquelles les messages sont émis avec clarté et précision, avec élégance et éloquence.

 

 

Nous lisons dans l’encyclopédie Universalise, à la page 70 :« le français est la langue la plus claire parce que la plus logique, et la plus logique  parce que l’ordre des mots y corresponds à celui des idées » ; et à la page 791 : « son système phonétique est ainsi fait qu’il évité l’éclat de l’espagnol, la monotonie de l’italien, la rudesse des idiomes  anglo- saxon » pour l’unique raison que  « le français issu du latin, a progressivement perdu l’usage des déclinaisons, qu’il a remplacé par des prépositions et des articles».

 

 

L’on ne dit pas le contraire pour le lari : « un des dialectes kikongo les mieux conservés , le lari a gardé en effet ses formes presque sans altération. Les exigences des règles grammaticales donnent à cette langue  une précision, une clarté qu’on tourne difficilement dans beaucoup de dialectes africains » Et  plus loin  : « du groupe kikongo, …, le lari  ( est) comme une nouvelle langue brassant presque tous les autres dialectes kikongo, avec des tournures plus jeunes, des formes elliptiques et contractés, qui la rendent plus souple, plus légère, plus expressive ».

 

 

Un fait qui illustre cette identité : le français a reçu du latin la phrase  " pater nostre " ; il l’a rendu par notre père au lieu de  " père notre   ". Le lari l’a reçu du français et par le jeu de l’elliptique, il a rendu élégamment par : " tat’éto " au lieu de tata dya beto, forme lourde et enfantine.

 

 

Par cet exemple fortuit nous allons conclure ainsi : Il y a deux choses que l’esprit de l’homme a crée le langage et le nombre. Aussi, la langue est le fruit de l’esprit humain.

 

 

Par les différences et identités que nous venons de mettre  en exergue dans cette étude nous ne pouvons dire que tel esprit est supérieur à tel autre. Mais, par la manifestation différente, convergente, identique de la pensée, des sentiments par la parole, l’esprit de l’Homme cherche à rendre au mieux, soit élégamment et éloquemment, ce qui sera bonnement entendu par l’Ouï. D’où les différentes structures : " bi fulu biole ", sonne bien à l’oreille dit en lari, mais il n’en va pas autant, dans cette structure, en français. Par contre : " nlele wa mwana " va bien à l’oreille dans cette structure en français : " le pagne de l’enfant ".

 

 

 

 

 

 

 

 

Références bibliographiques :

 

 

 

- Encyclopédie universalis, p. 72

- André Martinet, éléments de linguistique générale, A.Colin, 1996

- Emile Genouvrier, naître en français, Larousse, Paris 1986

- André Jacquot, textes laadi (kongo) , ORSTOM, Paris 1978

- B.BATANTU, MPANGI   NA  YAYA, cours  pratique de kikoongo, Collection Butsiele,   

  Brazzaville 1984

- Yves Michaud (sous la direction), Qu’est-ce-que l’humain ?, Odile Jacob, Paris 2000, vol.2

- La Grammaire Laadi

- Encyclopédie universalis, p.786

 

 

                                                                                               Brazzaville,  le 30 mai 2003 

 

 

 

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